Ah, la famille....[ft Sasha Keller et Catherine Sinclair]

Re-découvrir une partie de la famille c’est…Bizarre. Depuis que j’ai à peine dépassé mes vingt ans, j’ai toujours cru que je continuerai mon chemin seul. D’une part parce que maman est morte quand j’avais à peine six ans, d’autre part parce que mon père et moi, moins on se voit, mieux je me porte et enfin, parce que vu comment a tourné ma vie et les merdes dans lesquelles je me retrouve sans cesse, je n’ai aucune envie de traîner Evy là-dedans…Donc autant rester dans mon coin à faire mes conneries et alea jacta est, hein? Sauf que ce n’était pas du goût de ma grand-mère maternelle qui, après avoir vu ma trogne sur un programme d’un spectacle sur lequel j’ai travaillé, a repris contact avec moi.

Apparemment, papa s’était bien assuré que le côté maternel de la famille n'avait pas de nouvelles et encore moins accès à nos deux têtes blondes, aussi bien Evy que moi. Ce qui titille d’autant plus l’envie qui est toujours présente au fond de mon esprit de maudire d’une manière ou d’une autre mon très cher paternel. Passons. Sa lettre est accompagnée d’une autre, de la part de ma sœur. Elle, elle a fait ses recherches à partir du moment où elle a commencé à développer des pouvoirs magiques, et a filé chez Mamie Kitty (c’est ainsi qu’elle l’appelle dans la lettre) pour trouver de l’aide avec cela (et pour se casser de chez papa aussi, ce que je ne pouvais que valider). Depuis six ans maintenant, elle vit à la Vallée, apprenant à développer ses dons de magie Améthyste. Ouais, donc en gros y’a que moi qui fait tâche dans le tableau avec ma magie Grenat. Chose qui m’a fait hésiter à accepter la proposition de les rejoindre dans leur bled. Cependant, la curiosité de découvrir cette partie de ma famille et surtout de revoir Evelyn a eu raison de mes réserves et j’ai pris la voiture pour les rejoindre.

Si Kitty a été chaleureuse et accueillante, les retrouvailles avec Evy furent un peu plus musclées. Si ça a d’abord commencé par une étreinte qui a bien failli me briser une côte (et bon sang, quand est-ce que mon petit bout de soeur est devenue aussi forte?!), c’est un crochet du droit qui a rencontré ma mâchoire. D’accord, me barrer et la laisser chez le pater n’était pas la plus belle idée de ma vie, mais est-ce que ça justifie réellement un crochet aussi bien lancé? Je ne crois pas. Enfin, je ne me rebelle pas, car elle est comme moi Evy: elle a un caractère pas piqué des hannetons et je viens juste de la retrouver, je ne veux pas risquer de nous éloigner à cause de ma propre connerie…à nouveau. Puis il y a Sasha, le cousin. Jamais entendu parlé de lui avant aujourd’hui (enfin, à part nommé rapidement dans la lettre de notre grand-mère), ça sera une découverte.

Ça fait une semaine que je suis à la maison, que dis-je le manoir, familiale. J’ai vu pour obtenir une chambre la plus loin des autres habitants du lieu pour deux raisons principales: d’une part, je n’ai pas franchement envie de pourrir les énergies ou je ne sais quoi qu’ils vibent avec ma magie Grenat. D’autre part, on va pas se mentir, je compte pas devenir moine durant les quelques temps où je squatte le manoir. Soyons clairs: je ne veux pas rester dans ce manoir ad vitam aeternam; sauf que je suis parti un peu comme un seul homme sans prendre le temps d’assurer mon arrivée sur place. Je n’ai donc pas encore de travail, donc difficile de trouver un logement. C’est en cours cependant, si j’ai pris quelques jours pour récupérer des derniers mois qui ont été un peu chargés avec un nouveau spectacle, j’ai commencé à chercher du travail et j‘ai même un entretien avec le patron de l’opéra/théâtre se trouvant dans le quartier. On verra bien.

Le rendez-vous n’étant que cette après-midi, c’est donc glorieusement vers 10h30 qu’on me voit émerger de ma chambre, clairement pas encore tout à fait réveillé et simplement vêtu de mon peignoir de chambre, sans rien dessous. Roh, ça va, on voit rien non plus. Autant dire que la nuit dernière fut…active. Mes partenaires de la veille ont déjà déguerpi au petit matin, ils ont pris la peine de me réveiller pour me prévenir, gentille attention de leur part, avant que je ne me rendorme peu de temps après. Arrivant dans la cuisine, je me sert une tasse de café noir, histoire d’essayer de relancer les quelques neurones qui se baladent dans mon crâne. Je n’ai même pas fait gaffe à la présence d’une autre personne dans la cuisine…C’est dire.

Non, je n’ai pas sursauté, c’est totalement faux. Bon, si un peu, mais pas assez pour renverser la moindre goutte de café sur le plan de travail devant moi. En même temps, vous pensez être tout seul et d’un coup vous entendez une voix qui sort, virtuellement, de nul part. Osez dire que vous n’auriez pas au moins votre rythme cardiaque qui démarre au quart de tour d’un coup. Une fois mon cardiogramme revenu à la normale, je me tourne vers l’autre occupant de la pièce, Sasha, mon cousin. P’tain, ça aussi c’est nouveau, avoir un cousin. Déjà qu’avoir une grand-mère était déjà une nouveauté en soi, en plus y’a un cousin qui se mange avec. Ce qui veut dire que, quelque part, j’ai un oncle et une tante. Il est cependant trop tôt pour que mon cerveau envisage les ramifications que cela implique.

Je concentre les quelques neurones qui ont bien voulu se mettre en ligne pour écouter ce qu’il m’explique. Bon sang, comment peut-on être aussi réveillé à cette heure-ci? Un rapide coup d’oeil vers l’horloge de la cuisine m’indique l’heure et je fais une moue qui semble dire “ouais non logique en vrai”, puis reporte mon attention vers Sasha, adossé que je suis contre le plan de travail.

“Sloane” interjectai-je dans une micro pause de mon cousin qui cherchait le nom du dit blondinet.

Je chasse de l’avant de mon esprit les images de la nuit dernière avec le dit blond, ce n’est vraiment pas le moment. Ce n’est pas parce que ce ne sont, en général, que des coups d’un soir que je ne prends pas la peine de retenir leurs noms. Les seules fois où je ne me souviens pas d’un nom après une nuit agitée, c’est qu’en général j’étais plus ivre qu’un tonneau de whiskey, ce qui n’était pas le cas hier soir. Du coup le nom des deux personnes avec moi restent dans mon esprit. En plus j’ai une excellente mémoire des noms, ce qui est déjà un bon point pour moi, non? Bref. J’ai un petit rire et je vais prendre place sur une chaise à la table de la cuisine, en face de mon cousin, bâillant un grand coup.

“Merci de l’info. Je pense que Tina a oublié son soutien-gorge aussi quand elle est repartie, mais c’est pas grave.” je hausse les épaules et reprend une gorgée de café. “C’est une technique, effectivement. Après il a mon numéro, donc c’est pas comme s’il n’avait aucun moyen de me joindre.”

On sent cependant dans ma voix que dans un cas comme dans l’autre, ça ne me fait ni chaud, ni froid. Faut dire que je m’en fiche un peu si l’un ou l’autre me rappelle ou non après hier soir. Ça fait des années que ma vie sentimentale est un champ de mine dont je reste prudemment loin et que ma vie sexuelle, si tout autant un champ de mine, m’est beaucoup moins douloureuse à naviguer. Les partenaires s’enchaînent et parfois se ressemblent, parfois pas du tout. La vie est trop courte pour que je ne prenne pas un peu de plaisir quand je peux.

Laissant quelques instants de silence entre nous, je relève les yeux à ses paroles et affiche un immense sourire.

“T’es un sauveur mon gars, tu le sais ça?” laissant ma tasse sur la table, je me lève pour aller prendre une viennoiserie, une morceau d’essui-tout pour limiter les miettes à ramasser, puis revient à la table, mangeant tranquillement. “Alors, c’est quoi ton programme de la journée?”